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#DSK La théorie du complot de retour

27 novembre 2011

Depuis mes derniers articles, DSK a vu les charges émises contre lui abandonnées. Il est donc innocent, comme vous et moi, d’un éventuel viol au Sofitel de New York. Il a aussi perdu toute crédibilité comme homme politique suite aux différentes révélations sur sa vie libertine, les arguments dans l’opinion s’étendant de l’inacceptable (« c’est un violeur ») au débattable (« je ne veux pas être représenté par un libertin ») et au convaincant (« son attitude a été irresponsable, il est fragile »).

Néanmoins il continue à être persécuté par la presse, pour des raisons pas forcément très limpides, comme en témoigne la récente affaire du Carlton de Lille, après l’affaire Banon, dont tout expert savait dès le départ qu’elle ne pouvait être que classée.

Il est possible que ce lynchage médiatique ait une origine politique. Après tout Nicolas Sarkozy n’avait-il pas prédit le « feu nucléaire » à DSK s’il se présentait contre lui ?

En tout cas, il semblerait que DSK ait décidé de ne pas se laisser faire.

Après des mois de silence obligé, qu’on lui avait pourtant reproché, il avait répondu aux attaques lors d’un interview en prime time, qu’on lui avait bien sûr aussi reproché. Et avait répondu à la question du complot qu’elle restait ouverte: « Un piège ? C’est possible. Un complot ? Nous verrons ».

J’ai écrit et que je ne croyais guère en ces théories. Je commence cependant à être ébranlé.

Alors que le Carlton semblait un contre-feu aux affaires qui embarrassent l’UMP (avec M. Takieddine en guest star), on peut considérer le récent article du journaliste Edward Jay Epstein comme une réplique.

Il semble que par l’intermédiaire de ses avocats, DSK ait nourri une réponse qui soulève des lièvres intéressants. Partons du principe que ce que dit ce journaliste respecté est exact. On y apprend quelques pépites:

– DSK a été prévenu sur son Blackberry que celui-ci était écouté le matin du 14 mai. Il l’a aussitôt utilisé pour appeler sa femme en demandant à ce qu’on s’organise pour le faire expertiser. Ce Blackberry a disparu dans les 3 heures qui ont suivi (on a des témoignages comme quoi DSK l’a fait rechercher).

– Plus étonnant, il n’aurait jamais quitté le Sofitel, où il n’a pourtant jamais été retrouvé, ni jamais réutilisé.

– Encore plus incroyable, ses fonctions de localisation auraient été désactivées à 12:51, c’est-à dire au moment où l’ingénieur du Sofitel, Brian Yearwood entrait dans la Suite 2806, c’est-à-dire là le seul endroit où le Blackberry pouvait se trouver, sauf à ce que quelqu’un l’y ait volé avant.

– ce même ingénieur a échangé 26 messages avec un directeur de la sécurité de la chaîne Accor John Sheehan, de 12:21 à 12:24, heure à laquelle Nafissatou Diallo n’a encore officiellement prévenu personne de son « agression ». Ce même ingenieur exécutera une « danse de la victoire  » de 3 mn avec un inconnu encore non identifié, 2 minutes après que la police ait été appelée pour le viol (13:31).

– cet appel suit de 3 mn un sms de John Sheehan à ce même Brian, qui semble donc avoir donné un GO

– 1/2 heure auparavant, John Sheehan a appelé un numéro chez Accor où on répond avec un fort accent français. On peut donc supposer qu’il a pris ses consignes au siège.

Il faut rappeler que le responsable sécurité groupe d’Accor, supérieur fonctionnel de Sheehan, est Georges Querry, proche de Ange Mancini, Coordinateur National du renseignement pour Nicolas Sarkozy. Et que Georges Querry se rendait à ce moment à un match de foot aux côtés de Nicolas Sarkozy (début à 13:30 heure de NY). Enfin que Querry a reconnu avoir appelé Mancini, qui fera remonter à l’Elysée, mais officiellement seulement à 17h45 (heure de NY). Pour mémoire Nicolas Sarkozy sera vu en grande conversation téléphonique et visiblement préoccupé vers 16H45, heure à laquelle la NYPD (dont NS a décoré le chef de la légion d’honneur) décidera du sort de DSK.

– rappelons aussi que Diallo était accompagné par l’inconnu de la danse de la victoire avant de voir la Sécurité de l’hotel, qui était encore là pour accueillir police, avec le Dr de l’hotel. Il ne doit donc pas être compliqué à identifier. Rappelons aussi qu’elle est entrée 4 fois dans la chambre 2820 ce matin-là à 10h30, 11:00, 11:30, 12:26, alors que le Sofitel nous dit que le check-out de son mystérieux client n’a eu lieu qu’à 11:36.

– enfin, pour couronner le tout, on affirme que l’UMP était au courant de ce piratage et avait accès aux mails de DSK dans sa permanence de Paris.

On peut comme Edward Jay Epstein se limiter à la chronologie.

On peut aussi se poser des questions plus précises:

– Le Blackberry a bel et bien disparu au moment où l’on voulait le faire expertiser et a été desactivé: le soupçon de piratage est fort: à qui le crime profite-t-il, et qui a les moyens de mettre ça en place ?

– Quelqu’un est allé le chercher dans la chambre du Sofitel et il y a quand mêmes deux personnes suspectes: Diallo (qui revient dans la 2806) et Yearwood (que va-t-il y faire ?).

– Il est toujours aussi douteux que l’Elysée ou l’Intérieur, n’est pas été tenu au courant de cette affaire avant la nuit. Rappelons que l’interieur dictait par fax ce qu’il fallait demander à la comptable de Bettencourt. Ils sont plutôt bien informés en général. Rappelons aussi que les visiteurs de la veille venaient de l’affaire Carlton et étaient déjà surveillés.

– le Sofitel n’est pas collaboratif du tout dans cette affaire. Qu’à t-il à cacher ?

– Sans vouloir rouvrir le dossier du « viol », on peut de demander pourquoi on n’a pas plus entendu le témoignage du room-service, comment ça se fait que les bagages déjà faits et bien en vue dans l’entrée n’aient pas alerté Diallo, si l’acte sexuel n’a pas eu lieu après 12:13 (ce qui le rendrait moins précipité), pourquoi il a fallu attendre 3 heures pour aller à l’hopital si elle était si bouleversée, pourquoi Diallo a caché sa présence dans la salle 2820, et comment DSK a pu la tirer sur plus de 10 mètre de couloir…

A ce stade, on ne peut pas dire non plus que l’UMP soit mouillé ni qu’il y ait eu un piège prémédité, même si on a un peu oublié les propos de Bernard Debré et du jeune stagiaire Neuilléen Boris, qui semblaient avoir des informations de première main.

Il est par contre très probable que DSK ait été surveillé, que l’UMP en ait eu vent, la police sarkozienne semble bien bavarde sur ce sujet, et que cela faisait partie des arguments de campagne à ressortir au bon moment. On peut de demander aussi qui a autorisé un tel flot de fuites mensongères dans les débuts de l’affaire (quand Guéant disait alors que DSK n’était même pas jugé « il pourrait revenir faire sa peine en France »).

Reste la question: qui a les moyens de hacker le Blackberry du Directeur du FMI et de le récupérer si vite en cas de danger ? Et aurait pu monter un « piège » en ce but ?


7 commentaires

  1. Bonjour, cher Artypunk. Très bon article, infiniment plus clair
    que tout les résumés parus dans la presse française, et même parfois que l’original ! (Je signale juste une faute d’orthographe dans la dernière ligne du quatrième tiret « est été appelé » -> « ait été appelée ».)

    Ce point que vous soulevez des quatre visites de ND à la chambre
    2820 (avec une référence au Daily Beast qui cite une source proche du procureur) est extrêmement intéressant. Epstein ne mentionne que les deux dernières, qui après tout n’avait rien d’étonnant. Le fait qu’il y en ait quatre est beaucoup plus frappant, et surtout évidemment deux (ou même trois) avant le check-out de son occupant. Si ce fait est confirmé (il n’y a pas pour l’instant de raison d’en douter), la réponse du groupe Accor « notre client de la 2820 est partie avant, à 11h36 » se retourne contre lui. Pourquoi Epstein n’a-t-il pas mentionné les deux premières visites dans son article. Il les ignorait peut-être, ou bien, ne sachant pas à quelle heure le client de la 2820 était parti, elle ne présentait pas pour lui d’importance spéciale et il n’a parlé que des visites les plus
    proches dans le temps de la relation sexuelle, ou bien encore il a gardé en réserve cette information pour piéger Accor…

    Une question: sait-on où était le BlackBerry juste avant que son système GPS soit débranché ? On devrait pouvoir le savoir… Je n’ai pas vu cette information dans l’article d’Epstein.


    • j’ai répondu ci-dessous


  2. Merci pour le compliment.

    Concernant les entrées antérieures de N. Diallo dans la chambre 2820, on peut noter que le communiqué d’Accor ne les réfute pas, mais parle juste du check-out, sans évoquer non plus s’il y a eu contact ou non avec le client, tout en concluant que forcément ce dernier n’est pas impliqué.

    «L’historique informatique des chambres montre que le client de la chambre 2820 a procédé au règlement de sa chambre (check-out) à 11h36 et que la femme de ménage a fait le ménage de cette chambre immédiatement après, indique l’hôtel. L’insinuation selon laquelle le client occupant la chambre 2820 serait impliqué dans l’incident est donc fausse et sans fondement»

    C’est assez étonnant. Soit Epstein et le Daily Beast ont raison, et le Sofitel ment par omission, ce qui est un indice qu’ils ont quelque chose à se reprocher, soit ils ont tort et il y a eu intoxication de la presse, et dans les deux cas, ce devrait être facile à prouver.

    Je pense qu’Epstein ignorait l’heure du check-out, car il n’y aucune raison qu’il ait pu avoir accès à cette information, d’où le fait qu’il ne le mentionne pas.

    Concernant l’endroit où le Blackberry a été débranché, on peut sans-doute le savoir techniquement à quelques dizaines de mètres, car ce dernier doit savoir se repérer en fonction des bornes wifi, le gps ne fonctionnant normalement pas en indoor. On peut supposer que si la désactivation a été identifiée, on avait aussi l’information de localisation

    Si l’on relit l’article, il semble qu’il y ait eu désactivation de la fonction GPS, mais qu’on ait pu ensuite retracer sa présence dans le Sofitel (probablement par triangulation sur les données de l’opérateur puisqu’il a fallu l’intervention de la police). Ce qui suppose que le blackberry soit resté allumé, ou réallumé plus tard. Il y a donc présomption de vol, car il n’a pas pu se désactiver et se rallumer tout seul. Par ailleurs le fait qu’il ait été désactivé à 12:51 précises plaide aussi pour une action délibérée liée au départ de DSK. On sait que le Blackberry est retourné au Sofitel, il y en est donc très probablement jamais sorti.
    Le fait que Guéant parle d’une simple perte d’un téléphone signale aussi une mauvaise foi étonnante de la part d’un Ministre de l’intérieur sur un sujet dans ses compétences et judiciairement si sensible.

    (et je corrige la faute énorme, qui m’avait pourtant accroché l’oeil mais que j’ai laissé passer, la rédaction de l’article m’a clairement fatigué).


  3. Il serait TRES interessant de savoir si quelqu’un est alle dans la suite 2806 entre 3:29 PM (heure a laquelle DSK a signale l’oubli du BB au sofitel – on lui a signale qu’on allait verifier dans la chambre-)
    et 13 minutes plus tard (heure a laquelle il a ete rappele sur son telephone de secours – soit 3:42 PM -) car si personne n’est alle dans la suite, c’est qu’ « ON » savait qu’on n’y trouverait pas le BB et donc que le telephone se trouvait alors dans d’autres mains !
    D’autre part, si j’ai bien compris, le telephone a ete desactive TRES EXACTEMENT a l’heure ou Yearwood est entre dans la suite 2806 ! (12:51 PM). Curieux hasard …
    Si cette hypothese est bonne, cela veut dire que compte tenu du fait que la desactivation s’est faite quelques secondes au plus apres son entree dans la suite (12:51 / 12:51), UNE SEULE personne ( Yearwood ) a pu desactiver le BB, car IL SAVAIT OU se trouvait le BB (eventuellement cache par Diallo juste avant de sortir de la suite 2806 ?) donc Yearwood etait informe (par qui sinon par Diallo ?)
    1- de l’existence de ce telephone,
    2- de son emplacement EXACT dans la suite.
    3- de la manip. a effectuer pour la desactivation ( eventuellement juste oter la batterie ?)


    • Ça peut être intéressant, effectivement. Cependant, à ce moment personne n’accordait de l’importance à ce téléphone, ça ne prouverait pas forcément grand chose, si ce n’est que la Police n’a pas fait correctement son travail. En soi, ça vaut d’être creusé quand on sait que la Police a les premiers jours alimenté la presse de fausses nouvelles qui ont orienté le débat public.

      De toute façon, on sait que ce téléphone n’a pas été retrouvé alors que DSK a fait demander à ce qu’on ne l’utilise pas et que la police l’a cherché. Il a donc bien été subtilisé.

      Et effectivement la coïncidence sur l’heure (12:51) est étrange et Yearwood est bien muet depuis les révélations d’Epstein.


  4. @ Joel Bellaiche et artypunk

    sur les allées et venues de Diallo dans la chambre 2820, elles sont confirmées par le New York Times dans un article du 7 juillet 2011

    Diallo est entrée dans la chambre 2820 à 10h30, 11h00, 11h30, 12h26, selon l’enregistrement de sa clé magnétique. Donc aucune entrée entre 11h30 et 12h26

    @ artypunk (lui seul,lol)

    d’après Epstein, le fameux room service Syed Haque, est entré dans la suite 2806 à 12h05 (débarrasser le petit déj’), et Diallo à 12h06.
    1 ) Soit DSK a pris son petit déj’ dans la chambre, et donc il est impossible que Syed Haque n’ait pas entendu la douche.
    2 )Soit il a pris son petit déj dans le salon ou la dining room comme ils disent là bas, et la suite est grande, combien de temps lui prend de débarraser le petit déj ? 4, 5 minutes ?
    donc si DSK a pris son petit dans le salon Syed Haque a du aller le chercher la bas, et Diallo dit qu’elle est entrée directement dans la chambre. Alors à eux deux ils ont envahit la suite tout entière, et il est impossible qu’ils n’aient pas vu les affaires de DSK.
    d’autres part DSK n’est quand même pas allé prendre sa douche avec toutes ses affaires !

    Quelle que soit l’hypothèse, 1 ou 2 , il est impossible de nous faire croire que, eux, croyaient que la suite était libre.


  5. Le room service m’a toujours paru louche

    dsk, le retour du pourquoi du comment on aurait trouvé la méchante


    et encore plus le fait qu’on n’en ait pas parlé dans la presse. Ce fait signe pour moi l’incompétence ou la partialité de la plupart des commentateurs



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